"Ce blog pour réapprendre aux femmes à aimer vivre avec les hommes, et mieux comprendre le monde francophone contemporain"
Sébastien

"Selon les statistiques, il y a une personne sur cinq qui est déséquilibrée. Si tu es avec quatre personnes, et qu'elles te semblent toutes saines, ce n'est pas bon."
Jean-Claude Van Damme

"Je dédie ce blog à Naples, aux femmes, à la géographie, à la mesure et à l'intelligence."
Guillaume


vendredi 24 juin 2011

C'est tellement agréable de travailler à la Humbolt de Berlin, éloigné des passages à tabac de la revue française. Et si l'homme n'était adapté qu'à quelques bibliothèques et études dans le monde ? On imagine toutes ces vies gâchées en essayant de se plier en quatre de toutes ses forces pour rester dans un environnement qui ne convient pas à son biorythme, à la réceptivité de ses sens. Le monde qu'il faudrait habiter est sans doute celui qui se trouve sur terre le plus en  résonance à notre sensibilité. Au lieu de cela, les cerveaux cartésiens s'échinent à vouloir faire rentrer des objets carrés dans des trous ronds. C'est bien l'effet que ça fait de lire du français en France, chaque énonciateur joue furieusement du couteau à tartiner, les tartines succèdent aux tartines et en précèdent de nouvelles. Les imprimeurs s'empressent d'occuper le seul cabinet disponible en essayant de faire le plus d'odeur possible. Chacun est concentré sur son étroit diaphragme à en faire sortir les pépites de la fortune. La digestion dure des années comme chez les serpents conscriptors tropicaux. On se parle, on se caresse du regard, on se touche du bout des lèvres, comme on nettoierait le seuil de son intransitivité pour rester en propre.

Ce qui sauve l'homme français c'est sûrement sa marche, son usage pédestre pour se tirer loin d'ici, comme dit Koltes, les pieds n'ont pas de racines et sont fait pour se déplacer. D'être totalement libéré, comme dit Cendrars, des contraintes affectives. La féminité a libéré assez facilement le poète - mais il vivait à Paris, ceci explique cela - il a tout de même fréquenté son frère de Bâle de loin en loin toute sa vie.
SA

jeudi 23 juin 2011

Les sourds et muets sont formidables



Sur cette photo on peut voir deux choses. Premièrement le mini short d'été pour fille en toile de jeans est à la mode, à Berlin comme partout ailleurs dans le monde occidental. Deuxièmement, les deux garçons du fond sont des gars formidables. Pourquoi ? parce qu'ils sont sourds et muets. Etant vierges de toute connerie, n'ayant jamais entendu une fille parler musique, ils s'expriment d'une manière merveilleuse. Leur langue est une chanson de geste d'une grande légèreté et d'une subtilité infinie, pudique et respectueuse, tellement loin de ce monde étrange et agressif qui ne sait que brailler, qui surenchérit en décibel en fonction des temps forts de la journée, gaspille des phonèmes dans le vide ordure, et, en même temps, pèse comme un épicier les mots des uns et des autres sur la balance faussée de la justice. Les quelques rares humains qui protègent de la parole criarde sont précieux.
SA

Rostocker, une des meilleures bières qui soit


La brasserie Rostocker est réputée pour son honorabilité dans tout le Mecklembourg, si bien que j'en achetais au supermarché de grandes quantités en bouteilles en verre de 50cl, en 2007, pour boire en toute occasion. Dans la rue, le soir en revenant de soirée, le matin pour contrarier un vague à l'âme, à la gare en attendant le train. Dans les épiceries chinoises misérables quand je faisais le tour du bloc d'immeubles communistes de la banlieue de Lütten Klein. J'allais au fil des trottoirs avec de l'herbe qui poussait entre les dallages disjointifs. Il y avait beaucoup de verdure partout avec une odeur de pluie et de sable, et des gens pauvres coupés à la serpe. J'écrivais mon mémoire sur l'Italie du sud avec quelques bières posées sur le bureau de ma grande chambre. Quand je revenais du centre ville, pour rentrer chez moi, le tram passait juste devant la brasserie, sur cette photo. Je ne pouvais pas m'empêcher de regarder et d'imaginer ce qui se passait de l'autre coté du portail.
En face de la brasserie il y a le théâtre de Rostock. Vers avril 2007 on y jouait le Hollandais volant de Wagner, je voulais y aller, mais finalement ça ne s'est pas fait. Je ne savais pas trop ce que je faisais là. La méditerranée, et l'Afrique naturellement, c'est vraiment mieux quand on ne sait pas où aller ni quoi faire, on se fait tout de suite des amis qui justifient le voyage. L'Allemagne du nord, c'est bien pour écrire, mais on s'y sent seul aussi.

SA

mercredi 22 juin 2011


Je viens d'arriver à Berlin et je ne sais pas ce que je fais ici. je croupis dans une auberge de jeunesse, j'ai l'impression d'être un vieux poivrot qui abuse la jeunesse du regard. Berlin n'est pas une ville pour la bohème. Dieu merci, j'ai pu travailler avec allégresse quelques heures dans cette bibliothèque de la Humbolt, en grande banlieue (photo ci dessus) et j'attends demain avec impatience pour pouvoir refaire la même chose. Dès que je suis sorti du bus de Paris, j'ai cherché un internet café, puis un lit pour trois nuits, puis un kébab à bouffer, puis du jus de fruit vitaminé, puis l'Université, puis la bibliothèque, puis les chiottes de cette dernière où j'ai fait ma toilette, puis la salle des périodiques, puis j'ai travaillé, comme je fais depuis 10 ans dans toutes les villes et les bibliothèques universitaires du monde. Quand j'étais à Metz vers 2001, je fuguais souvent en transport en commun vers la seconde bibliothèque universitaire, en banlieue. Quand j'étais à Nancy et que j'en avais ma claque de la salle de lecture un peu vieillotte, où je me suis initié à l'internet, je prenais le train de Munich, sans prévenir, un grand cigare dans la bouche pendant le trajet que je passais avec des manuels aéronautiques, des articles sur l'Afrique que j'avais photocopié plus tôt, Je descendais à Strasbourg, et de là je prenais le tram pour la BU des sciences et gestions, avec une attention particulière portée sur les WC de l'établissement : propres, avec de l'eau chaude, une grande glace, une chasse d'eau puissante et du papier en abondance. Puis je suis parti au Quebec. La bibliothèque de l'Université Laval est une des plus grosses du monde. Je la connais par coeur, de la cantine à la cave, au toilettes à l'américaine, en passant par les ascenseurs, la salle des périodiques, les recoins entre les livres où je faisais la sieste. De Quebec, j'aillais en bus plusieurs fois pas mois, pour Montréal, pour travailler dans l'une ou l'autre des trois universités de la ville. Puis de retour en France, j'ai fait la BU d’Avignon, deux fois en 2005 et 2008, puis les BU de Paris 4 et 10 sur trois ans, avec un passage à Paris 8 et 13 et aussi celle de Cergy qui n'était pas si mal. Puis Naples, mais là je n'ai trouvé la bibliothèque des sciences sociales qu'en 2010, soit avec 4 de retard. Après Naples, j'ai découvert la BNF à paris, où j'ai commencé, je m'en souviens comme si c'était hier, les premières lignes de mon mémoire de master 2 totalement nul. Puis, je suis parti en Allemagne où j'ai liquidé l'université de Tuebingen, puis celle de Rostock, ces deux villes où j'ai continué et terminé l'écriture de mon mémoire sur la Calabre, endroit où je n'avais jamais mi les pieds. Je revois ces longues heures de train entre deux bières et deux cigarettes à écrire mes pages entre Rostock et Metz. Après ça, j'ai fréquenté les établissements suisses de Bâle, Berne et Lausanne. Lausanne qui m'a laissé un tellement bon souvenir, autant par la qualité de l'infrastructure que par ses boites de nuit. Après j'ai visité, enfin, la BU de Reggio calabre et juste avant celle de Brighton en Angleterre. Puis, après, j'ai traîné à la fac de Gand, de là, je suis retourné à Naples où j'ai finalement trouvé la BU, puis je suis retourné en Calabre, à Consenza cette fois, un joli petit campus. Je dois d'ailleurs toujours 20 euros à une prof de là bas, et quelques uns de ses livres à lui restituer. Puis, j'ai visité la fac de Tirana en Albanie peut être pendant 20 minutes, celle de Malte, aussi juste après, où j'ai pu travailler au moins une heure. En revanant de Malte, j'ai fait un crochet par la BU d'Amsterdam, très impressionnante. Puis encore beaucoup Nanterre ces dernières semaines et enfin la Humbolt de Berlin. Et pendant tout ce temps, j'y ai fait mes études, puis mes deux mémoires, puis j'ai essayé d'écrire deux articles scientifiques. Je me suis beaucoup lavé dans ces BU, j'y ai souvent fait mes besoins, je n'y ai jamais rencontré personne.

SA

mardi 21 juin 2011

Billard et fête de la musique.





Autant l'avouer, j'ai me bien cette chanson.
Oui, parce que parfois l'amour je m'en balance, mais alors s'il ne s'agit pas d'amour, je m'en balance encore plus. Et puis on croit qu'il va dire qu'il est né à Rome qu'il écoute La Castafiore ; mais non il parle de Paris et de Jonyy Halliday, il a un grain ce Vilard. Il n'a pas dû avoir la liste... La preuve, ce demeuré roule pour Sarkosy.
J'écoutais ça, il n'y a pas d'autre mot, car j'avais l'intention de faire un post sur Diane. Diane qui, quand je l'ai invité à aller faire un tour, m'a dit qu'elle allait faire un billard avec des potes. Or j'ignore si quand une Parisienne dit "Je veux faire un billard avec de spotes", ce la signifie je suis avec des amis donc tu peux venir, ou je suis avec des amis, donc tu ne peux pas venir. Inutile de me prétendre que ça peut voulir dire l'un ou l'autre. C'est faux. Il y a une liste quelque part, j'ignore où, car justement on ne me l'a pas donné, avec des entrées correspondant à des définitions, et en 3è colonne la punition, si terrible, en cas de désobéissance, que l'enfreindre serait folie. Donc je n'ai rien trouver d'autre à dire que j'aime pas le billard pour couper court à toute interprétation. J'ai tort, essayer aurait été bon, au moins j'aurais pu être déçu car toute illusion que l'on entretient su le compte de cette ville est un tort.

Lisons maintenant la description que consacre son auteur à cette vidéo :
"Dans cette vidéo, les hommes de la petite sirène disent qu'il ne se soucie pas de ce qui ne parle pas d'amour. Dans l'ordre, il y a Louis le cuisinier, Sébastien, Grimsby avec Eric, Triton avec Sébastien, un marin, Eurêka. Puis les filles de la petite sirène font les choeurs. Dans l'ordre: les escargots, les soeurs d'Ariel, Ariel elle même. J'adore cette chanson et je suis plutôt fière du résultat."

On déduit de cette note que la personne en question est une fille, car elle est fière, et qu'elle porte un vif intérêt aux listes, comme les enfants collectionnent les images des joueurs de football, d'animaux ou les blagues carambar. Ce qui n'est pas du tout une critique, car cet intérêt déployé pour la liste, est à ce niveau, presque scientifique, un méta-intérêt si l'on veux.
Le bât blesse, lorsque la fascination de la liste tourne à l'adoration.
C'est-à-dire lorsqu'elle tient lieu de pensée, en qu'une lieu d'idées, de réflexions ne s'affrontent plus que des listes.
Or, miracle d'Hervé Vilard et de la petite sirène, j'ai tout à coup entrevu, de mes yeux entrevu, une partie du phénomène.
Il faut aller à 2, 50
et qu'est-ce qu'on voit à 2,00 précise et que l'auteur a oublié de préciser dans sa description ?
Une murène !
Et une murène qui parle...
Mais une murène de la mauvaise liste, tout commel es Hyènes de Share khan ou du Roi Lion...
Ils doivent se creuser la tête chez Walt Dysney pour savoir quel animpal va faire l méchant et lequel le gentil, mais sans cela pas de dessin animé !
Or, nous adorons tous les dessins animés de Walt Disney.
Pourquoi ?
Et bien tout simplement pour le plaisir des listes !
Eh bien précisément pcqu’il faut classer, lister, et que cela renvoie à un plaisir
Un stade où l’on avait rien d’autre à faire qu’à s’engraisser de lait et d’images, afin de se construire une représentaton du onde libre , gratite et snasle moindre droit d’auteurs, le paradis…

dimanche 19 juin 2011

Pauline à la plage.

Jeunes Parisiens se découvrant des affinités sur une plage de province française.

Je suis content.
Content parce que j'ai rencontré Pauline, sur la péniche, près de la bibliothèque François Mitterrand, du sur-Rohmer, donc.
Ce qui est bien avec Rohmer c'est qu'il fait de la Parisienne, en l'isolant avec quelques spécimens masculins de son espèce, dans un biotope culturel -un cultope, donc ?-  type La Baule, une espèce exotique comme les autres. Certes, il est fait des tonnes, c'est lourd, pas sulfureux pour un sou, ennuyeux et pédant, mais ça remet plus ou moins les pendules à l'heure. Les Parisiennes sont de toutes les femmes parmi les moins désirables, parce que les plus casse-bonbons, ce qui apporte peu et enlève beaucoup. Ce jugement est malheureusement valable et quand on les connaît bien et quand on les connaît peu. Mais qu'on soit né en région parisienne, ou qu'on s'y soit rendu pour assouvir un besoin - primaire- d'exacerbation de statut social, on est bien obligé de faire avec.
Mais bien que ne je ne pouvais quitter des yeux les fins réseaux bruns irriguant ceux clairs, bleus de Pauline, ce ne sont pas eux les délicieux coupables de mon hébétement.
Je suis content, parce qu'au moment de dire à Pauline quelque chose d'aussi essentiel que : "on peut se revoir si tu veux."
Elle a répondu : " Oui, mais je dois te dire que j'ai un copain."
Je suis content parce que cela veut dire qu'elle estime, qu'autrement, quelque chose, éventuellement, aurait pu se passer entre nous. C'est du moins ce que j'en ai pensé sur le coup.
10 min et 17 km de RER plus tard, je doute un peu. Peut-être cela voulait-il dire : il faudra ruser, peut-être est-ce une invit. à me surpasser, peut-être veut-elle simplement éviter les situations pesantes, peut-être les parisiennes doivent forcément se fendre d'une phrase de ce genre dans une telle situation, peut-être sont-ce les nouvelles formules de politesse intrapériphérique ?
En fait, je n'en sais rien. Mais je suis content parce que je sais qu'il s'agissait d'une séquence d'anthropologie.
C'est-à-dire qu'un message était censé être créé à l'occasion, et c'est l'intention qui compte.
Enfin du langage.
Pour donner un exemple, c'est comme si après vous avoir observé du haut de son beffroi, un seigneur étranger daignait envoyer un messager. La réponse ne sera pas forcément celle souhaitée, un interprète sera peut-être nécessaire, mais le scribe a mis en face de votre nom, une entrée dans le registre de la jeune fille.


NB : Reverrai-je Pauline ? IL y a peu de chances, en raison de cette gestion des relations humaines, non -amoureuses, propres aux Parisiennes consistant dans un flux-tendu à contre-emploi. En effet, le flux-tendu de chez Billancourt sert à fluidifier, en sorte qu'un maximum de voitures, finalement, se vende et se produise. Le flux-tendu de la parisienne exploite toutes les techniques les plus modernes, téléphone, internet, absences de stocks, mais pour parvenir à la saturation artificielle du réseau. Cette saturation a pour but de rendre chère la place, par miracle libérée dès que le client est prêt à y mettre le prix., puis à éjecter facilement la personne du réseau, en prétextant un accroissement d'activité. Et non , je ne suis pas prêt à y mettre le prix, car ce prix détruit la chose en elle-même. C'est comme si l'on veut, un critique de théâtre m'en faisait la remarque, lorsque dans un spectacle de Bartabas, la colombe personnifiant la liberté est attiré sur le poing de la cavalière par une poignée de grain, du blé quoi. Un tel jugement que je ne ferais pas le mien pour tout l'or du monde, repose sur une dégradation du lien à l'agri-culture, au profit d'un symbolisme de type listeux, mais c'est un autre sujet. J'aurais pu parler de la prostitution, mais que j'ai tellement plus d'estime pour tellement plus de prostituées que de Parisiennes...
Les yeux de Pauline, et les quelques heures passées ensemble n'en prennent pas ombrage...

G-A

Voir aussi : http://spqrxx.blogspot.com/2011/10/chanson-dediee-aux-parisiennes.html

Fous-toi du train comme du cinéma ou ce sont eux qui se foutront de toi


Sous la caméra de Blaise Cendrars, qui est monté sur le tender pour faire son plan, Ivy Close, la petite machiniste anglaise de la Roue salue Abel Gance son réalisateur français préféré.


"La Roue", Abel Gance, 1923
"Le mécanicien-chef Sisif recueille une petite orpheline à la suite d'une catastrophe de chemin de fer. Elle s'appelle Norma et est élevée avec Élie, le fils de Sisif. Peu à peu Sisif se sent pris d'une passion pour sa fille adoptive. Il devient alcoolique, ombrageux, soupçonneux, violent. Norma séduit un ingénieur des chemins de fer, Monsieur de Hersan qui menace  Sisif d'un chantage s'il ne consent pas à lui donner Norma. Celui-ci se résigne mais, en conduisant le train qui emmène la jeune femme vers son futur mari, souhaite mourir avec elle. Grâce à son chauffeur, l'accident est évité. Sisif reporte son amour sur la locomotive. Un jet de vapeur brûle les yeux de Sisif qui est muté au service du funiculaire du Mont-Blanc. Élie suit son père. Plus tard, Norma venue passer des vacances à Chamonix avec son mari retrouve son compagnon d'autrefois. Les deux jeunes gens découvrent leur amour réciproque. Hersan, jaloux, se bat avec Élie en montagne. Leur chute les tue l'un et l'autre. Sisif reste vieux et solitaire, tributaire de son travail monotone. Il voit revenir vers lui Norma, seule aussi et pauvre, qui va veiller sur ses derniers jours".

Après Gance, Renoir se met aussi à filmer des trains. "La bête humaine"1938 :

"La Bête humaine,  c'est la "Lison", un monstre de fer, d'acier et de cuivre, une locomotive à vapeur dont le machiniste, Jacques Lantier, est en proie à la folie homicide. Ce dernier ne se trouve bien qu'en compagnie de son chauffeur Pecqueux, sur sa locomotive. Pour son malheur, il rencontre Séverine dont le mari, chef de gare du Havre, vient d'assassiner Grandmorin, le parrain de la jeune femme à qui elle avait cédé. Lantier tue Séverine dans une crise de démence et se suicide"

Après Gance et Renoir, le cinéaste Sébastien Jousse, à son tour, veut filmer des cheminots. "Cheminots", 2010 :

"A l’initiative du Comité d’établissement des cheminots de la région PACA dans le cadre de son action culturelle, ce long-métrage interroge l’histoire de l’entreprise et de ses valeurs. Un train entre en gare de La Ciotat. Le berceau du cinéma est le point de départ d’un voyage à la rencontre de celles et ceux qui travaillent quotidiennement à «faire le train». Au fil des rencontres avec les cheminots, l’évidence se révèle : le train a structuré un réseau, une communauté et un territoire. Le train est porteur d’une certaine vision du «travailler et vivre ensemble». Le train fait société. Mais aujourd’hui, à l’heure de la libéralisation économique et de l’ouverture à la concurrence, le réseau est divisé, les services et les métiers sont séparés. A la fin du film, le Grand Résistant Raymond Aubrac souligne que la résistance face au recul progressif du Service public est l’affaire de la société toute entière.


Trois films, trois relations passionnées autant que monstrueuses entre le cinéma et le chemin de fer français. Cette fascination pour l'acier est peut être à l'origine même du cinéma français ? Ricciotto Canudo dit en 1914 : "La théorie du septième art, telle que, pour la première fois, je pus l'exposer au Quartier Latin, il y a trois ans, a gagné le terrain de toutes les logiques et se répand dans le monde entier. Dans la confusion totale des genres et des idées, elle a apporté une précision de source retrouvée". 

Cette source retrouvée dont il parle, c'est surement de filmer les ingénieurs et les infrastructures de transport qu'ils conçoivent. 100 ans plus tard, Sébastien Jousse continue ce travail en donnant la parole à Raymond Aubrac, un ingénieur très résistant de l'école des ponts et chaussés qui dit, en substance : "En faisant sauter nos voies ferrées, en 44, nous savions que nous arrêtions le flux vital de la circulation qui maintenait la France en vie grâce au chemin de fer et qu'il faudrait tout reconstruire après".....Mais, en même temps, peut-on deviner dans les yeux de l'ingénieur combatif : "nous ne savions vraiment pas quoi faire sauter d'autre".

SA





lundi 13 juin 2011

Voici de la charcuterie : les viocs par France Télévision


"Je suis heureux, heureux, heureux...grâce à elle"  Nous dit Jean Paul, 78 ans, en pleine possession de ses moyens, avec son sourire d'enfant qui fait craquer les filles. Il caresse du regard son amoureuse belge, irradieuse dans sa petite robe rose bonbon. A gauche de JP, on reconnait le vieux copain, Charles Gérard, 84 ans et toutes ses dents, lui aussi semble tout heureux de passer à la télévision.


Cette deuxième image pourrait être tirée de l'émission 30 millions d'amis, spécial chevaux. Ce brave grand père, Antoine, 75 ans, est un bon paysan des Vosges avec l'accent à couper au couteau de la région. Il travaillait, quelques années avant de passer à France télévision, pour l'armée française. C'est le colonel Argoud, putschiste comme pas deux, ennemi  juré de De Gaulle auquel il voue une haine mortelle depuis 1940. Pourquoi ? On en sait rien. De même que le cameraman de France TV encadre Jean Paul pour que celui qui fut l'égérie de Jean Luc Godard, nous apprenne, lui même, qu'il est totalement gâteux et heureux de l'être en plus.... (premier extrait ci-dessous)


                     "La palme est à moi" Jean Paul, heureux entre sa nouvelle copine et son vieux copain

.....De même, le pseudo documentaire animalier consacré au Colonel de l'OAS (extrait ci-en bas) ne nous explique pas pourquoi ce dernier ne pouvait pas blairer le Général, ni rien sur la manière dont il comprenait la situation politique en 40 et en 1960. En revanche, on apprend : 
- Que comme de nombreux repris de justice, Antoine a retrouvé son équilibre auprès des animaux, ce qui a facilité sa réinsertion. 
- Qu'il a fait de l'équitation durant sa jeunesse
- Qu'il a des théories farfelues mais rigolotes sur l'histoire de la cavalerie 
- Qu'il est tout ému quand il se souvient de ses vieux copains putschistes
- Qu'il a une autre théorie rigolote qui dit que plus on a d'enfants, plus on est susceptible de faire un putsch. 

Sur ce dernier point, pudique et respectueux, le journaliste n'ose pas révéler au vieux colonel ce que le spectateur ne peut s'empêcher de penser : 14 enfants en vie....c'est peut être une raison suffisante pour s'engager dans un putsch ?

Antoine, repris de justice, nous parle de son amour des chevaux et des ses anciens copains d'armée 

SA


dimanche 12 juin 2011

Guéhenno, Braudel, Cendrars : les chiens de guerre


Photos de haut en bas : Jean Guéhenno, Fernand Braudel, Blaise Cendrars.

Le 29 juillet 1914, le suisse Blaise Cendrars publie  (alors qu'il vient de faire passer quelques poèmes dans le Sturm de Berlin), avec Canudo (un excité méridional des Pouilles monté à paris pour mettre la pagaille dans le cinéma français), cet appel à la guerre contre l'Allemagne  : 
L’heure est grave ! 
Tout homme digne de ce nom doit aujourd’hui agir, doit se défendre de rester inactif au milieu de la plus formidable conflagration que l’histoire ait pu enregistrer.
Toute hésitation serait un crime.
Point de paroles, donc des actes. 
Des étrangers amis de la France qui ont pendant leur séjour en France appris à l’aimer et à la chérir comme une seconde patrie, sentent le besoin impérieux de lui offrir leurs bras.
Intellectuels, étudiants, ouvriers, hommes valides de toute sorte-nés ailleurs, domiciliés ici, nous qui avons trouvé en France la nourriture matérielle, groupons nous en un faisceau solide de volontés mises au service de la France.”

Signé : Canudo, Blaise Cendrars, Léonard Sarlius, Csaki, Kaplan, Berr, Oknotsky, Isbicki, Schoumoff, Roldiref, Kozline, Esse, Lioschitz, Frisendahl, Israilevitch, Vertepoff.

Concernant l'engagement de Cendrars,  Albert t'Serstevens, son meilleur copain, note : "Je m'en voudrais de parler ici [l'engagement de Cendrars] d'amour pour la France et autres poncifs tricolores. C'était pour lui une merveilleuse occasion de satisfaire son gout pour l'aventure, et la guerre était sans doute la plus chaude que pu rêver un homme de sa trempe. Il s'est battu dans la craie de champagne comme il l'avait fait dans les cabarets d'Anvers, mais avec beaucoup plus de fougue et d'abnégation. Il a conservé de cette bagarre et de ses copains un souvenir ébloui qui se manifesta dans ses livres. Il a passé tout le reste de sa vie à espérer le retour d'une pareille fête."

Et puis il dit quelques lignes plus loin que, de toute manière, Blaise était incapable de faire du mal à qui que ce soit, et qu'il a du passer dans sa vie peut être une semaine maximum dans le grand port belge. 

A propos de ce même engagement, mais vu du coté des académiciens, Braudel et Guéhenno discutent en buvant  des verres dans un bar au sortir du boulot, en face de l’académie. Avec l'alcool les langues se délient. Braudel racontera plus tard :  "Un soir, Jean Guéhenno soutenait avec vivacité contre moi qui m’efforçais de défendre le Péguy de 1914 : "Cette guerre de 14 n'était pas mon affaire". Le destin l'y avait engagé mais il n'avait jamais pu "croire tout à fait au fond de lui même" qu'elle fut "vraiment la sienne".  J'avoue, que je suis mal préparé à comprendre une telle perspective, peut être parce que, contrairement à Jean Guéhenno, breton, qui place la patrie au dessus de la nation, je pense en homme de l'Est, adossé à l'appareil unitaire de la France, conscient que sa liberté dépend de cette unité et de la vigilance  qu'elle implique."

SA   






dimanche 5 juin 2011

Avant les franques, il y avait les gauloises

Extrait des Martyrs de Chateaubriand

Venant à moi, Velléda me dit :
"Mon père dort ; assieds-toi, écoute. Sais-tu, me dit alors la jeune barbare, que je suis fée ?"
Je lui demandai l'explication de ce mot.
"As tu entendu la dernière nuit le gémissement d'une fontaine dans les bois, et la plainte de la brise dans l'herbe qui croît sur ta fenêtre ? Eh bien, c'était moi qui soupirais dans cette fontaine et dans cette brise ! Je me suis aperçue que tu aimais le murmure des eaux et des vents. "
J'eus pitié de cette insensée : elle lut ce sentiment sur mon visage.
" Je te fais pitié, me dit-elle. Mais si tu me crois atteinte de folie, ne t'en prends qu'à toi. Pourquoi as-tu sauvé mon père avec tant de bonté ? Pourquoi m'as-tu traitée avec tant de douceur ? Je suis vierge : que je garde ou que je viole mes voeux, j'en mourrai. Tu en seras la cause. Voilà ce que je voulais te dire. Adieu ! "
Elle se leva, prit sa lampe, et disparut.

Un autre soir Velléda parut tout à coup.
" Tu me fuis, me dit-elle, tu cherches les endroits les plus déserts pour te dérober à ma présence ; mais c'est en vain : l'orage t'apporte Velléda, comme cette mousse flétrie qui tombe à tes pieds. "
 Elle se plaça debout devant moi, croisa les bras, me regarda fixement, et me dit : " J'ai bien des choses à t'apprendre ; je voudrais causer longtemps avec toi. Je sais que mes plaintes t'importunent, je sais qu'elles ne te donneront pas de l'amour ; mais, cruel, je m'enivre de mes aveux, j'aime à me nourrir de ma flamme, à t'en faire connaître toute la violence ! Ah ! si tu m'aimais, quelle serait notre félicité ! Nous trouverions pour nous
exprimer un langage digne du ciel : à présent il y a des mots qui me manquent, parce que ton âme ne répond pas à la mienne. "
Après un moment de silence elle ajouta :
" Il faut pourtant qu'il y ait quelque raison à ton indifférence. Tant d'amour aurait dû t'en inspirer. Cette froideur est trop extraordinaire. "
 Elle s'interrompit de nouveau. Sortant tout à coup comme d'une réflexion profonde, elle s'écria :
" Voilà la raison que je cherchais ! Tu ne peux me souffrir, parce que je n'ai rien à t'offrir qui soit digne de toi" Alors s'approchant de moi comme en délire, et mettant la main sur mon coeur : "Ah ! malheureuse Velléda !tu ne seras jamais aimée ! "
La voix de la jeune barbare expire ; la main qu'elle tenait sur mon coeur retombe ; elle penche sa tête, et son ardeur s'éteint dans des torrents de larmes.  Cette conversation me remplit d'effroi. Je commençai à craindre que ma résistance ne fût inutile. Mon attendrissement était extrême et je sentis tout le reste du jour la place brûlante de sa main sur mon coeur.

En vain je me dérobai à la vue de Velléda : je la retrouvais partout ; elle m'attendait des journées entières dans les lieux où je ne pouvais éviter de passer, et là elle m'entretenait de son amour. Un autre jour encore elle me dit :  "Une voix mensongère t'aura peut-être raconté que les Gauloises sont capricieuses, légères, infidèles : ne crois pas ces discours. Chez les enfants des druides, les passions sont sérieuses et leurs conséquences terribles. "  Je pris les mains de cette infortunée entre las deux miennes : je les serrai tendrement.
" Velléda, dis-je, si vous m'aimez, il est un moyen de me le prouver : retournez chez votre père, il a besoin de votre appui. Ne vous abandonnez plus à une douleur qui trouble votre raison et qui me fera mourir. "

Je descendis de la colline, et Velléda me suivit. Nous nous avançâmes dans la campagne par des chemins peu fréquentés où croissait le gazon.
" Si tu m'avais aimée, disait Velléda, avec quelles délices nous aurions parcouru ces champs ! Quel bonheur d'errer avec toi dans ces routes solitaires, comme la brebis dont les flocons de laine sont restés suspendus à ces ronces ! " Elle s'interrompit, regarda ses bras amaigris, et dit avec un sourire :
" Et moi aussi j'ai été déchirée par les épines de ce désert, et j'y laisse chaque jour quelque partie de ma dépouille. "
Revenant à ses rêveries : " Au bord du ruisseau, dit-elle, au pied de l'arbre, le long de cette haie, de ces sillons où rit la première verdure des blés que je ne verrai pas mûrir, nous aurions admiré le coucher du soleil.  Souvent, pendant les tempêtes, cachés dans quelque grange isolée ou parmi les ruines d'une cabane, nous eussions entendu gémir le vent sous le chaume abandonné. Tu croyais peut-être que dans mes songes de félicité, je désirais des trésors, des palais, des pompes ? Hélas ! mes voeux étaient plus modestes, et ils n'ont point été exaucés ! Je n'ai jamais aperçu au coin d'un bois la hutte roulante d'un berger sans songer qu'elle me suffirait avec toi. Plus heureux que ces Scythes dont les druides m'ont conté l'histoire, nous promènerions aujourd'hui notre cabane de solitude en solitude, et notre demeure ne tiendrait pas plus à la terre que notre vie. "
Nous arrivâmes à l'entrée d'un bois de sapins et de mélèzes. La fille de Ségenax s'arrêta, et me dit : " Mon père habite ce bois, je ne veux pas que tu entres dans sa demeure : il t'accuse de lui avoir ravi sa fille. Tu peux, sans être trop malheureux, me voir au milieu de mes chagrins, parce que je suis jeune et pleine de force ; mais les larmes d'un vieillard brisent le coeur. Je t'irai chercher au château."  En prononçant ces mots, elle me quitta brusquement.

Je sentais, il est vrai, que Velléda ne m'inspirerait jamais un attachement véritable : elle manquait pour moi de ce charme secret qui fait le destin de notre vie ; mais la fille de Ségenax était jeune, elle était belle, passionnée, et quand des paroles brûlantes sortaient de ses lèvres, tous mes sens étaient bouleversés. Tel est le danger des passions,que même sans les partager vous respirez dans leur atmosphère quelque chose d'emprisonné qui vous enivre. Vingt fois, tandis que Velléda m'exprimait des sentiments si tristes et si tendres, vingt fois je fus prêt à me jeter à ses pieds, à l'étonner de sa victoire, à la ravir par l'aveu de ma défaite. Au moment de succomber, je ne dus mon salut qu'à la pitié même que m'inspirait cette infortunée. Mais cette pitié, qui me sauva d'abord, fut en effet ce qui me perdit, car elle m'ôta le reste de mes forces. Je ne me sentis plus aucune fermeté contre Velléda ; je m'accusai d'être la cause de l'égarement de son esprit par trop de sévérité. Un si triste essai de courage me dégoûta du courage même ; je retombai dans ma faiblesse accoutumée.