Dans cette parodie française d'une série TV américaine du début des années 1990, les deux personnages, une femmes blonde et un musicien d’atavisme latin, sont en train de parler d'amour.
Ca me fait penser à Malte, où il m'est arrivé presque la même chose avec une jeune femme Belge, de Liège, que j'ai rencontré à mon hôtel et qui s’appelait Hélène. Elle était assez jolie, et aimait Coco Mademoiselle de Chanel. Elle sentait bon, mais était bête, parce qu'elle ressemblait trait pour trait à la femme de cet extrait.
Elle se la pétait, en référence à l'amour qu'elle portait à un musicien. Elle se prenait pour la reine amoureuse des nuits liégeoises...la princesse du musique hall du plouc-ville Wallon .Un soir, au café, alors que nous avions bu, je lui demandai s'il elle était amoureuse, de la même manière que dans ce film l'homme le demande à la femme. Elle me répondit très sérieusement que...oui, d'un guitariste, un merveilleux guitariste très doué.
"Alors tu es ce genre de fille qui tombe amoureuse d'un musicien ! " dis-je, pour la provoquer.
"Non" me répondit elle, "tu dois savoir que je l'aime lui, en propre, pour ce qu'il est plus que pour sa guitare, mais lui ne m'aime pas. Plus loin de lui je suis, plus heureux il est, et plus amoureuse de lui je suis...mon Dieu qu'il est beau....c'est un des meilleurs guitaristes du bar où je travaillais avant...".
Elle aurait très bien pu rajouter comme dans cet extrait : "arrête de me faire souffrir inutilement, tu oublie que je suis sensible". Car je la voyais comme renversée par une vague, tout offerte, facile, le regard un peu comme une balise de détresse qui lance des SOS, ou comme le gyrophare d'une ambulance, happée, faible femme qui glissait vers un autre garçon de Namur...un danseur léger, qui aimait aussi la musique rock..Je la voyais comme une joueuse de Poker, attendrissante, qui abat, triomphante, ce qu'elle pense être la carte ultime pour tout rafler et, enfin, partir flamber la caisse sous les tropiques avec son amant maudit...mais, en fait, de se planter, comme d'habitude, et de se faire tondre une fois de plus.
Beaucoup de filles belges sont ainsi, petites barista saisonnières, toquées du pilier de bar, des cordes du petit gars toxico, odieux et abject en vérité, qu'elles imaginent être le plus grand joueur du monde, artiste, selon le petit répertoire musicologique qu'elles possèdent. Je sais que beaucoup de filles françaises souffrent de ce même mal aussi. Et ce soir, en regardant cet extrait, je comprends qu'on en riait déjà dans les années 1990, de ces cloches qui s'imaginent être des divas, d'un coté, et en même temps, de l'autre, qui crient au monde leur indignation de se trouver à marcher seules et boiteuses dans les rues des capitales à la tombée du jour, de bars en bière et tout ça pour souffrir trois mauvais accords commis par le connard du quartier. Il faut croire que le rire est conservateur.
SA
samedi 19 février 2011
samedi 12 février 2011
Le bordel au pays de Descartes...Je vous laisse juge
Cet extrait des Bons Vivants illustre la fermeture d'une maison close parisienne de haut standing, dont les clients sont vraisemblablement des visiteurs étrangers, comme ces deux suisses de l'extrait. On ne connait pas la flore parisienne de l'établissement.
Au contraire, la scène suivante (fenêtre vidéo ci-dessous), montre un tenancier de bordel de Toulon, joué par Frank Villard, dont les habitués étaient des notables de la région. Renié par ses anciens clients, il remonte la vallée du Rhône dans une relation Province/Paris, dont le "gap" centre/périphérie, compensé par l'automobile, semble être accentué par la fermeture des maisons closes : "partout des ruines". (La fin du film revient sur la nature de la Province française, en présentant De Funes en agent d'assurance qui transforme son domicile en bouic clandestin dans une ville de 7000 habitants, avec la complicité de ses amis, le juge, le docteur, le notaire, le journaliste du coin... )
Ainsi, même si Paris est une capitale franco-française, c'est aussi une ville qui connait un tourisme sexuel cosmopolite, lequel échappe à la sociologie provinciale, comme si la ville lumière, bien que n'étant pas un port, était une sorte de grand lupanar, foyer de tolérance raffiné de tous les vices possibles, dont l'attractivité consiste à accorder ses salons roses aux meurs des salons internationaux de la porte de Versailles, comme celui de l'Auto dans l'extrait.
En dépit des foires, le tourisme sexuel est vaincu par le tourisme culturel ou romantique de l'île de la Cité (le quai des Orfèvres, le palais de justice à la Conciergerie, les bateaux mouches) et plus encore par le tourisme de masse, sur les plages françaises, l'été, qui serait en réalité un rapatriement en métropole d'"Honolulu", pour compenser la fermeture des maisons de plaisir des villes, ou, autrement dit, du plaisir disparu de rester à la maison. Une telle substitution étant imputable à la multiplication des "romano de plein air", bohème...genre camping, auto-stop et sandwich. C'est alors un déclassement, une descente en gamme dans la ruralité des arts urbains de l'amour, qui s'accompagne d'un travestissement du littoral provincial en île tropicale. A l'opposé, le choix d'un tourisme "réellement" exotique et élitiste, à Abidjan ou à Hong Kong, est considéré comme seul capable d'égaliser la qualité des prestations parisiennes défuntes. On peut y voir une anticipation de l’émergence des villes globales dans les pays en développement, en terme de qualité de services avancés et de traitement des flux étrangers.
L’énonciateur, B. Blier, ne pense pas un instant qu'il puisse y avoir un autre but que la maison de plaisir dans les voyages d'agrément ou d'affaire. C'est un refus de prendre les phénomènes sociaux que sont la prostitution et le tourisme, comme des questions structurelles de société, mais, plutôt, l'idée que chacun est libre de faire ce qu'il veut selon sa fantaisie, indépendamment de tout engagement civique ou responsabilité morale...la loi frappant de manière aveugle et aléatoire. Le malheur, c'est simplement que le bon gout se perd.
SA
!
mardi 1 février 2011
Après la Tunise et l'Egypte, la France ?
"Mon frère, mon ami, mon fils, mon camarade Tu ne tireras pas sur qui souffre et se plaint"
Jean Ferrat
Un marin du Cuirassier Potemkine de Sergueï Eisenstein.
Marin du Tsar hier, soldat tunisien ou CRS français aujourd'hui, ces hommes robustes et aguerris, à la mâchoire carrée et au service de l'ordre, ont aussi une conscience sociale développée. Parfois il font même preuve d'une certaine compassion envers les opprimés.
Par un petit matin de froid, engoncé dans une rame du RER, je suis occupé à lire le monde sur le papier recyclé des journaux gratuits. Je n'ai pas jeté un seul regard sur les deux voisins qui m'enserrent sur la banquette en skaï, parce que je suis en train de réfléchir.
En effet, je pense. Aujourd'hui, il y a l'Égypte dont le régime pourrait basculer. En France, les CRS ont gagné leur combat, les casernes ne seront pas fermées tout de suite, à croire qu'ils ont suivi une formation en syndicalisme avancé....Des CRS gauchistes, est-ce possible ?
Hier, quelques milliers de personnes dans les rues de Tunis ont gagné une révolution que quelqu'un a baptisé gracieusement de "Jasmin". De ces révolutions démocratiques que l'on aime aimer : des « oeillets » au Portugal, « orange » en Ukraine, de « velours » pour les Tchèques et les Slovaques...et en France...notre pauvre ratage de l'été : des millions de manifestants dans les rues, des grèves terribles : le mépris absolu du gouvernement. Peut être que Michelle Alliot-Marie a raison, que le régime de Ben Ali se serait maintenu grâce à l'aide nos CRS. Du moins....à ce qu'étaient nos CRS jusqu'il y a seulement quelques jours, avant les actions de grèves de la faim lancées par ces derniers depuis certaines casernes. Il paraît même que, quelque part dans le pays, certains policiers refusent de verbaliser des automobilistes en infraction. Après la Tunisie...l'Égypte et puis...la France...?
J'y pense. Guaino disait : " La Tunisie, c'est presque un problème de politique intérieure pour la France, tellement les liens sont étroits". Oui, il a raison. Les tunisiens sont nos frères. Mais eux ont résisté au bourrage de crane de la propagande conservatrice et ont enfumé les redoutables services du renseignement intérieur et de la sureté de l'État, la ( toute nouvelle) DCRI chez nous, la DSE chez eux.
J'y pense. Juppé disait " la Tunisie était un pays stable politiquement, qui se développait économiquement, où le statut de la femme s’améliorait, où des classes moyennes émergeaient, où un effort important a été fait du point de vue de l’éducation". En conséquence, les tunisiens ont balayé pacifiquement le pouvoir en place.
J'y pense encore. Demorand, "plutôt à gauche" , demandait sur Europe 1, station "plutôt à droite", à Melanchon, "carrément à gauche", dans l'hypothèse où le pays est vraiment en train de se déliter à cause du libéralisme, pourquoi la vraie gauche sociale ne fait pas spontanément l'adhésion générale. Melanchon ne comprend même pas la question...la réponse est si évidente... à force de taper sur les gens, ils ne se revoltent plus. J'y pense de plus en plus. Mais pourtant, il n'y a pas si longtemps, Georges Marchais marchait dans Paris à la tête des ouvriers français le 13 mai 68, et le Général s'enfuyait en hélicoptère rejoindre l'armée de l'est, à Baden Baden. Pourquoi Paris ne se fleurit-il pas à nouveau des cerisiers du printemps des peuples ?
Ces CRS qui font la grève de la faim, sont-ils en train de retourner les matraques contre leurs employeurs, tout comme les marins du cuirassier Potemkine le firent-ils avec leurs carabines ? Ce qui signifierait que le régime actuel est en train de s'écrouler et que la 6 ème République est pour demain. Ou, au contraire, le désespoir des policiers, proviendrait-il d'une crise existentielle causée par la découverte soudaine de leur inutilité ? Pour reprendre une certaine chanson, aujourd'hui, finalement, on ne frapperait plus vraiment...et ça deviendrait fade de faire de l'ordre à toute force, presque un travail de nana commandé à ceux qui savent lire...Que devrait dire Maxime Leforestier qui conseillait, en 1970, un travail dans la police aux parachutistes ? Anachronisme.
L'odeur de shampoing et d'eau de toilette des hommes et des femmes usagers du Stif qui se rendent au travail à Paris, toilettés de frais, dans la vielle rame Alstom des années 80, me monte à la tête. Hier, j'ai lu que l'Île de France avait la productivité du travail la plus forte en Europe. Les gens d'ici savent se tenir comme il faut et faire du fric. Peut être que, comme les 300 000 français qui bossent quotidiennement dans les affaires à Londres, ceux auxquels Fillon à rendu hommage recemment, sommes-nous en train de nous la jouer "keep smiling" :-)
Peut être que les nouveaux métros qu'Alstom et Siemens se disputent au Caire et à Tunis ont-ils contribué à organiser la foule en ligne de bataille contre le despotisme ? Mais ces mêmes infrastructures risquent aussi d'engendrer, demain, la fin de la révolution permanente, de la conscience de classe, au profit de la civilisation globale.
Et si le problème c'est qu'il n'existe justement plus de classes moyennes en France ? Que le statut du travailleur s'est dégradé notablement depuis les années glorieuses de l'après guerre ? Que la jeune femme française d'aujourd'hui est moins émancipée que sa propre maman ou que sa consœur tunisienne ?
J'y pense avec acuité. La Belgique est sans gouvernement depuis des mois, et n'en aura probablement plus jamais. Benoit Poelvoorde se laisse pousser la barbe pour marquer le coup, et ressemble ainsi un peu à ces esthètes athéniens, philosophes barbus de l'Antiquité, méprisés par des Romains qui ne juraient que par la discipline militaire du poil ras. Et que se passe t'il donc dans les rues de Bruxelles, autrefois foyer de tension politique majeur ? Rien, absolument plus rien à signaler. On peut donc vivre en paix sans État, sans se mettre dans tous ses états.
SA d'après une idée de GA
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